Articles par Père Mathurin
de la Mère de Dieu
Vieillir est une grâce
par Père Mathurin de la Mère de Dieu
Dans notre siècle où la jeunesse, la beauté, la force, la performance sont follement exaltées, tandis que le
vieillissement est dissimulé à tout prix, caché et même très souvent carrément méprisé, oser dire que la
vieillesse ou la maladie est une grâce, une bonté de Dieu, c’est sans nul doute susciter pour le moins un
grand étonnement. Et dans certains cas, l’incrédulité totale, voire même la révolte. Et pourtant! rien de
plus vrai. Rien aussi de si peu enseigné! Selon le plan de Dieu, les personnes souffrantes et vieillissantes
occupent une place de choix dans le Corps de l’Église.
«Une place de choix», pourquoi? Parce que les personnes âgées sont,
ou en tout cas devraient être, le grand soutien de l’Église par leur intense
vie de prière, leur grande vitalité spirituelle et leurs patients sacrifices de
chaque jour. Les bonnes personnes âgées sont, dans la société, une inspi-
ration et un encouragement pour les plus jeunes, d’abord encore par cet
esprit de prière, par leur sagesse et leur sens des vraies valeurs, par
l’exemple de leur sérénité et de cent «petites vertus» cachées que les
malaises et inconvénients du vieillissement graduel leur ont appris à pra-
tiquer.
Les personnes âgées ont, dans l’Église et dans la société en général, le
rôle de «paratonnerres»; elles peuvent obtenir toutes sortes de grâces et
de protections sur l’humanité... pourvu bien entendu qu’elles acceptent
vraiment leur rôle.
La vieillesse n’est pas un fléau; c’est une bénédiction de Dieu pour
préparer les âmes à leur éternité. Ce n’est pas sans raison que l’Église
inclut dans les Litanies des Saints l’invocation suivante: «De la mort
subite et imprévue, protégez-nous, Seigneur.»
C’est une bonne chose de demander d’accéder à la vieillesse, si telle
est la volonté de Dieu. Il y a des morts prématurées, même chez les
Saints, mais ce n’est pas la norme. Face au décès d’une jeune personne,
on dit spontanément: «Il n’avait que 20 ans... elle n’avait que 40 ans.» Ce
n’est pas la normalité. Même de très jeunes enfants meurent... Mais au
XXI
e
siècle, dans les pays qui ne sont pas en guerre, les gens en général vivent beaucoup plus vieux qu’anciennement. La
longévité des humains a beaucoup augmenté ces dernières années. C’est une immense miséricorde de Dieu, mais qui s’en sert
comme d’une miséricorde de Dieu?
En vieillissant, normalement on se détache de la terre et de ses vains plaisirs. Avec l’âge viennent les malaises, la maladie;
on flétrit un peu, parfois beaucoup. La «structure» se détériore peu à peu. C’est un dessein de Dieu pour nous détacher de la
terre et nous rapprocher de Lui. C’est d’ailleurs le but de toute notre vie, que nous soyons jeunes ou vieux: vivre le plus
possible en union avec le Christ, marcher sur Ses traces.
«Dieu nous a créés pour Le connaître, L’aimer et Le servir en ce monde afin d’être heureux avec Lui pendant toute l’éter-
nité», dit le petit Catéchisme. Qui de nos jours y pense?... Qui en parle et le pratique? Hélas! la plupart des vieillards eux-
mêmes sont plus occupés à se distraire et à s’amuser que lorsqu’ils étaient jeunes. Dieu, l’Amour Infini, est trop souvent bien
loin de leurs préoccupations.
L’esprit du Monde
On entend régulièrement les gens d’un certain âge dire: «Le temps passe tellement vite! Hier encore, nous avions vingt
ans! Et nous voici à soixante, soixante-dix, quatre-vingts ans. On a été bridés toute notre vie par le travail, les obligations
familiales, maintenant on veut profiter au maximum du temps qu’il nous reste et s’amuser, voyager, se distraire enfin! On a
fait notre temps, maintenant on peut bien se permettre cela.»
Ce sont des distractions permanentes et quotidiennes, du matin au soir. C’est tellement facile, d’ailleurs, avec la technolo-
gie moderne. Musique, télévision, internet… gadgets de tout genre. Il y a de quoi se distraire en permanence, vingt-quatre
heures par jour. Malheureusement, la plupart des vieillards entrent dans le jeu, souvent poussés par l’entourage qui les y
encourage fortement. Ils veulent oublier leurs souffrances, leurs maladies. Ils veulent profiter de ce qui leur reste de vie, mais
ils n’en profitent pas de la bonne façon. D’ailleurs toutes ces distractions ne les rendent pas heureux. Ils ont l’âme vide, parce
que Dieu n’y a pas Sa juste place. Se distraire, c’est tout ce qui compte. Et après avoir vécu leurs dernières années dans la
dissipation, ils mourront de la même façon.
Quelle tristesse de penser que la grande majorité des personnes âgées qui ont déjà, pour ainsi dire, un pied dans l’éternité,
vivent ainsi ne pensant qu’à se distraire et à oublier la mort à venir! Je ne jette la pierre à personne, car qui leur a enseigné, ou
qui les aide maintenant à penser que le temps de la vieillesse est un temps de purification, de rapprochement avec Dieu en vue
du Ciel à venir? Oui, Dieu nous destine tous au Ciel, mais contrairement à ce que prêchent les faux prophètes d’aujourd’hui,
on n’entre pas au Ciel sans la «robe nuptiale» dont parle l’Évangile. (S. Matth. 22, 11-12; Apoc. 21, 27: Il n’y entrera rien de souillé...)
Le plan de Dieu
Comprenez-moi bien, nous n’aurons jamais assez de bonté envers
nos personnes âgées, nos vieillards. Il est très important de leur donner
de la joie, du réconfort, par toutes sortes de petites attentions et de gen-
tillesses, de prévenances dans leurs besoins. Nous devons nous
appliquer à soulager leurs souffrances le plus possible, nous ingénier à
alléger leur fardeau.
Mais vouloir trop les distraire par des films et des jeux de toutes
sortes, ce n’est pas un bon service à leur rendre. Surtout pas pour des
prêtres et des religieux qui ont une vocation spéciale de consécration
totale à Dieu... Mais même pour les personnes du monde, ce n’est pas
un bon service à leur rendre que de trop les distraire, de leur faire regar-
der ou entendre des mondanités. Dans une atmosphère de joie
tranquille, ceux qui ont soin des malades et des vieillards devraient,
avec doigté et respect, chercher à amener les âmes à Dieu, à leur donner
du temps pour la prière, pour le recueillement. C’est très important,
non seulement pour eux, mais c’est une œuvre d’Église. Les plus jeunes,
ceux qui sont en pleine activité ont besoin du secours des prières des
personnes âgées. Il faut absolument qu’ils aient cet appui-là! Ils ont
besoin de la grâce.
Même les personnes qui ont mené une très bonne vie doivent se faire rappeler que «l’âge d’or» comme on dit maintenant,
ou les «seniors», vivent un temps de miséricorde. Forcément, la vie n’est pas toujours parfaite. Quand on est jeune on ne se
sert pas toujours de nos capacités à bon escient. Le bon Dieu, dans Sa miséricorde, nous permet de nous purifier de tout cela
par la vieillesse. Oui, au cours de la vie, on s’est purifié, on a demandé pardon au bon Dieu, mais le bon Dieu nous donne
encore une autre occasion de faire quelque chose pour Lui. Vraiment, pour Lui seul, dans la prière, dans l’immolation, avec
toute notre attention tournée vers Lui.
La plupart des humains, même les meilleurs, sont distraits de Dieu bien souvent au cours de leur vie. Parfois ce sont de
grosses «distractions» et elles ont duré longtemps. Et dans Sa bonté infinie, le bon Dieu a conçu un plan pour donner à Ses
enfants la chance de réparer, de compenser: c’est le temps de la vieillesse. On ne développe pas assez ce point d’enseignement
chrétien. J’en souffre, parce que le bon Dieu en souffre. Il nous donne cet avantage de vieillir et au lieu de Le remercier et
d’utiliser ce temps pour nous rapprocher de plus en plus de Lui, on veut se distraire. Et souvent, on se lamente: «Ah! ce n’est
pas drôle, je n’ai plus les mêmes capacités, j’ai mal ici, j’ai mal là...» tandis que la vieillesse est une grande bénédiction, un
temps pour se dédier davantage à Dieu, à la prière, à la réparation et à l’intercession. Vieillir n’est pas un châtiment, c’est une
bénédiction.
Donner le ton divin au monde
Mes frères, mes sœurs, de nos jours cette attitude chrétienne face au vieillissement est à peu près inconnue, parce que très
peu ou pas du tout prêchée. C’est à nous de le faire. Mais il faut d’abord nous en convaincre nous-mêmes et le pratiquer, sans
quoi on ne pourra pas le transmettre au monde.
Supposons que je dise à une religieuse: «Ma sœur, je vous
confie ces gens. Faites leur comprendre que leur vieillesse est
une vraie miséricorde de Dieu.» Vous devriez être capable de leur
inculquer cela. Même les plus jeunes; chez les plus âgés, ça
devrait être normal. Je ne devrais même pas avoir à leur dire
qu’il faut leur inculquer cette grande vérité.
Il ne s’agit pas de se mettre à sermonner bêtement les per-
sonnes âgées. Non, si vous aimez vraiment le bon Dieu et si vous
avez à cœur le bien des personnes qui vous sont confiées, vous
pourrez leur faire comprendre cette vérité, avec beaucoup de
bonhomie, et même une pointe d’humour, même si vous êtes
encore jeune. «Regardez, le bon Dieu est en train de me faire la
même miséricorde qu’à vous! Je commence à grisonner, vous
voyez j’ai même des rides qui apparaissent...»
Et ensuite gentiment, on peut leur faire comprendre que la
vieillesse n’est pas un châtiment, mais une bénédiction et une
miséricorde. Tout le monde dit «ce n’est pas drôle, le bon Dieu est dur!» Non, Il n’est pas dur! Il prend tous les moyens pour
nous conduire à Lui, dont la vieillesse, la maladie, l’infirmité. Cela fait partie de Ses miséricordes. Ce ne sont pas des châti-
ments. Il faut en être convaincu. Il faut nous-mêmes le vivre.
Quand on est jeune, plein d’énergie et d’entrain, malgré même notre idéal de sainteté, sans même trop s’en rendre compte,
on se laisse accaparer par nos occupations, par le matériel, par la terre. Même notre devoir d’état nous accapare, nous distrait.
On le fait pour le bon Dieu, mais on est quand même un peu distrait parce qu’on a tellement d’activités. À notre insu, il y a
beaucoup d’humain dans ce qu’on fait, beaucoup. Lorsqu’on devient malade, vieillissant, moins capable physiquement, on
peut penser davantage à Dieu, on peut davantage se préparer à l’éternité. C’est une bénédiction.
Vous, chers frères, chères sœurs qui êtes dans nos diverses missions, il faut communiquer ces vérités au monde. Cela fait
partie de l’instruction qu’il faut donner aux gens. Nous devons donner le ton divin. Beaucoup de personnes âgées fréquentent
nos chapelles. Il faut leur rappeler de ne pas perdre leur temps quand elles quitteront la chapelle. Comme je disais plus haut,
c’est tellement facile aujourd’hui de distraire les vieillards! Il ne faut pas se faire piéger. On peut les distraire sans fin, avec
des films, ou internet, etc. Pourtant, ils ne sont pas plus heureux! Ils ont l’âme vide. Nos vieillards ici n’ont pas l’âme vide.
Chez ceux qui prient le plus, quelle lumière, quelle flamme sort d’eux! Ils prient. Ces personnes âgées, ce sont des tré-
sors.
Permettez-moi de le répéter: quand l’énergie physique diminue, les capacités physiques diminuent, c’est une miséricorde
du bon Dieu. Il permet cela pour qu’on se concentre sur l’essentiel, pour qu’on se prépare à ce qui finalement est le plus
important: notre éternité, Dieu même. On dit l’éternité, mais l’éternité, c’est Dieu. (Dans Sa Miséricorde, ou dans Sa Justice
pour ceux qui auront rejeté Sa Miséricorde.) Le but de notre vie sur terre est l’union à Dieu, pour préparer le Ciel. Le bonheur de
l’éternité, c’est l’union à Dieu, mais déjà sur la terre, il faut toujours tendre à cette union. C’est le but de la vie et on y manque,
on l’oublie tellement! On est si facilement distrait! Et la maladie, la vieillesse, c’est pour augmenter, parfaire cette union à
Dieu. C’est uniquement pour cela. Je voudrais que le monde croie cela, et qu’ils en vivent.
Heureux Saint Joseph!
Il meurt entre Jésus et Marie.
ADRESSE:
Monastère des Apôtres
290 7e rang
Mont-Tremblant QC J8E 1Y4
Venez nous rencontrer ou vous
recueillir dans notre Chapelle.
9 am – 5 pm
AUTRES
CONTACTS:
Tél: 819 688-5225
Fax: 819 688-6548